Le Comité National Olympique et Sportif (CNOSF) a sollicité les candidats à l’élection présidentielle autour de 5 objectifs et 12 propositions auxquels le candidat du Front de Gauche à l’élection présidentielle, Jean Luc Mélenchon a répondu par courrier (ci-joint). Nous avons le plaisir de vous adresser ces réponses avec en complément quelques propositions issues du programme du Front de Gauche. Vous trouverez l’ensemble de nos propositions approfondies sur les activités physiques et sportives dans le document « Une nouvelle ambition pour le sport français : l’humain d’abord » (ci-joint). Les nombreuses assemblées citoyennes organisées partout en France par les militants du Front de Gauche sont également l’occasion pour les acteurs du mouvement sportif, de continuer le débat et d’enrichir nos propositions.
Nos constats et objectifs rejoignent les vôtres et les renforcent, notamment dans cette période de crise économique et d’accroissement des inégalités qui pose de manière plus aiguë la question de la place accordée au sport dans notre pays et de l’accès de toutes et tous aux pratiques physiques et sportives. Notre réponse est claire, le sport est un droit pour toutes et tous et nous mettrons tout en œuvre pour rendre ce droit efficient car il participe à l’éducation pour l’émancipation de la personne. Pour cela nous devrons prendre une nouvelle orientation politique car les fondements du modèle sportif français ont été sérieusement attaqués par les politiques menées ces dernières années. Comme beaucoup d’acteurs du sport, nous dressons un lourd constat d’abandon du service public du sport. La suppression de 5000 postes de professeurs d’EPS (soit 13% de l’effectif du corps) et des déficits croissants d’heures d’enseignement faute d’enseignants remplaçants, la disparition de services déconcentrés du ministère des sports et la perte de capacités de missions et d’actions des directions régionales chargées des sports avec la disparition de 15% des effectifs de fonctionnaires liée au non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant en retraite, la fermetures de 8 CREPS laissant ainsi certaines régions sans outil structurant, l’abandon pur et simple de métiers et d’un budget consacré au sport régressant en dessous des 0,2% du budget de l’Etat… Nous sommes bien loin des 3% promis au CNOSF en 2007. Dans le même temps la réforme de la fiscalité et le gel des crédits ont considérablement affaibli les capacités d’intervention des collectivités territoriales, entraînant dans certains territoires la baisse des budgets consacrés au développement du sport.
Nous sommes totalement convaincus que l’égalité d’accès à toutes les pratiques sportives passe d’abord par l’école, avec l’enseignement de l’EPS et la promotion du sport scolaire. Pour le Front de gauche augmenter les horaires pour atteindre de 3 à 5 heures hebdomadaires, créer des postes d’enseignants d’EPS en insistant sur le niveau de formation et la qualité des contenus, soutenir l’expansion du sport scolaire et universitaire et implanter les équipements nécessaires, sont les quatre piliers sur lesquels nous souhaitons nous appuyer.
Nous considérons que le sport est un élément important de notre culture et que la politique sportive de la France ne saurait être réduite à constituer en première intention, un instrument des politiques de santé et de cohésion sociale. Le premier objectif qui doit être confié au sport est de permettre à chaque pratiquant(e) d’atteindre le plus haut niveau d’accomplissement de soi, ce qui implique le développement de nombreuses connaissances. Le sport constitue à ce titre un bien public et un outil d’éducation et d’émancipation permettant à chacune et chacun de développer son potentiel de liberté et de créativité. Cette orientation doit promouvoir l’intégrité physique et psychologique des sportifs et au-delà, de la promotion de la santé et de la prévention sanitaire. Il nous parait prioritaire d’inscrire notre action dans le long terme par la mise en place de formations à la médecine du sport et d’assurer le développement de centres médico-sportifs dans chaque département avec une mission de prévention. Nous rétablirons également le remboursement à 100% par l’Assurance maladie, des visites médicales pour les certificats de non contre-indication à la pratique. La lutte contre le dopage doit être une grande priorité nationale et les dispositifs doivent être renforcés à tous les niveaux de la pratique par des moyens financiers, humains et matériels accrus, notamment pour l’Agence française de lutte contre le dopage.
Nous considérons que la vie associative joue un rôle essentiel d’éducation populaire pour l’émancipation humaine et la formation à la citoyenneté. Seule une politique nationale affirmée de formation, de valorisation et de soutien aux associations et au bénévolat sera garante de sa pérennité. L’engagement bénévole ne doit pas être un luxe. Or, cet engagement dépend des conditions de vie, de la disponibilité en temps et d’un niveau de revenu permettant de s’épanouir dans une activité sociale désintéressée. En conséquence, nous proposerons d’adopter une loi cadre sur la vie associative valorisant l’engagement des bénévoles afin de leur garantir le temps et la formation nécessaires pour pouvoir se consacrer à la vie de leur association. L’activité bénévole pourra être intégrée dans la valorisation du cursus scolaire et des droits à la retraite, faire l’objet de validation des acquis de l’expérience (VAE) et être intégrée au droit individuel de formation (DIF). Nous garantirons la représentation des associations dans toutes les instances de concertation à tous les échelons de vie démocratique et nous inscrirons l'engagement associatif dans la constitution de la 6ème république. L’engagement bénévole et l’activité associative seront soutenus au regard de leurs objectifs éducatifs et de garanties liées à l’exercice de la démocratie dans la vie associative. Pour alléger les contraintes et proposer un accompagnement efficace, il nous parait important de soutenir les centres de ressources locaux d’aide à la vie associative et aux bénévoles et les groupements d’intérêt économique ou les groupements d’employeurs. Enfin, le soutien aux associations sportives en entreprise sera également une de nos priorités aussi renforcerons nous la loi sur le fonctionnement des comités d'entreprises et sur la participation financière de l’entreprise.
Nous partageons votre proposition d’améliorer et d’élever la formation de l’encadrement professionnel du sport, afin de développer dans les clubs, les pratiques pour le plus grand nombre et y accueillir le mieux possible de nouveaux publics et les fidéliser. Pour cela nous soutiendrons le développement de l’emploi et de la formation. Nous réinstallerons au sein du service public l’ensemble des formations du champ sportif et de la recherche en sciences du sport et nous veillerons à l’harmonisation du système de formation et des diplômes entre les filières universitaire et sportive. Ce dispositif s’appuiera sur un réseau national de formation aux métiers du sport mis en œuvre dans les établissements du ministère chargé des sports et à l’université dans la filière STAPS. La filière d’éducateurs sportifs de la fonction publique territoriale constitue un débouché professionnel que nous revaloriserons. Enfin, la valorisation de l’encadrement professionnel ne pourra être efficiente sans rouvrir un débat destiné à améliorer la convention collective nationale du sport, afin de garantir une réelle reconnaissance de tous les métiers relevant des activités physiques et sportives, avec pour objectif de garantir la sécurité de l'emploi, du déroulement de carrière, de la formation et de la retraite.
Vous vous interrogez sur l’absence de clarification des compétences entre l’Etat, les collectivités territoriales et le mouvement sportif. Vous conviendrez que c’est la conséquence directe de l’absence de loi cadre depuis la loi de 2000, dite « loi Buffet », et que durant la dernière mandature, nous n’avons vu passer à l’Assemblée Nationale que des lois de circonstance : loi sur la profession d’agent sportif, loi sur les paris en ligne, loi d’exception pour les stades de l’Euro 2016… De plus, la loi sur la réforme des collectivités territoriales a été votée sans clarification sur les compétences et sur les moyens. Nous nous félicitons de la mobilisation du mouvement sportif et du CNOSF qui a permis le maintien provisoire d’une compétence partagée sur le sport dans le cadre de ce débat. Nous proposons donc de débattre d’une loi cadre tenant compte des nouveaux enjeux du sport, définissant les principes de l’action publique, le rôle de chacun et les moyens nécessaires, notamment pour ce qui concerne le maintien des financements croisés entre les différentes collectivités territoriales. Ce débat doit se tenir en présence de tous les acteurs du sport, et pour cela nous organiserons des assises nationales du sport sur l'ensemble du territoire et instaurerons sur cette base, une instance de concertation à chaque échelon du territoire. Appuyées sur des observatoires régionaux du sport, ces instances d’évaluation, de réflexion et de proposition seront destinées à adapter les politiques sportives aux réalités et enjeux territoriaux. Ces instances seront dotées des moyens de fonctionnement requis pour l’exercice de leurs missions de revitalisation du service public du sport.
L’institutionnalisation de l’établissement public du « Grand Paris » par l’actuel gouvernement vient doublonner et brouiller inutilement les compétences des acteurs institutionnels en charge de l’aménagement territorial de la région capitale. Nous interrogerons la pertinence de cette institution qui, si elle devait perdurer, ne pourrait pas faire l’économie de la prise en compte de la question sportive. Aussi nous nous félicitions de la réflexion engagée au regard de l’aménagement de l’agglomération parisienne. En effet, le sport constitue un enjeu important pour une métropole qui doit être en mesure d’accueillir les plus grandes compétitions internationales. Le sport est également un moteur structurant en matière d’urbanisme et de développement économique, à l’image du Stade de France et du territoire de Plaine Commune. Nous constatons une multiplication des projets de grands équipements sportifs pour les prochaines années. Mais nous le voyons bien, s’il n’y a pas une mise en cohérence de ces équipements, la concurrence entre les projets et les territoires aura des conséquences préjudiciables autant pour la viabilité de ces équipements que pour le développement du sport. Cela nécessite donc d’approfondir les diagnostics territoriaux et l’analyse des besoins de la population avant d’aboutir à un schéma cohérent d’équipements sportifs intégrant des réponses aux besoins en matière d’équipements de proximité. Un travail sur les réserves foncières et sur l’aménagement du territoire avec les collectivités territoriales est également nécessaire. Nous devons par ailleurs tirer les conséquences des candidatures précédentes à l’accueil des Jeux Olympiques et de l’absence d’adhésion de la population au projet comme cela a été le cas pour la candidature d’Annecy. Si nous voulons rassembler la France sur un projet olympique, sur des valeurs d’excellence mais aussi de solidarité de partage et de paix, nous devrons initier un réel débat démocratique qui associe tout les citoyens au projet et à la conception des équipements qui y sont liés.
Concernant la haute performance sportive, nous considérons qu’elle doit être soutenue comme un élément essentiel de création de richesses culturelles, économiques et technologiques. Cependant, ces richesses doivent être mises au service du développement du sport pour toutes et tous. La pratique du sport professionnel, en particulier, devra être mis au service d’objectifs humanistes, d’éducation, de progrès pour toutes et tous et devrait être mieux encadré réglementairement. Les athlètes français sont parmi les meilleurs mondiaux grâce à l'efficacité de la structuration et la qualité de notre système de formation. Aujourd’hui d'autres pays nous ont imités et nous rattrapent notamment en matière de formation. Nous accusons un retard croissant en recherche et développement appliquée au sport et en centres d'entraînement pour la préparation au plus haut niveau. Nous renforcerons donc les centres de formation, d'entraînement et de recherches, tels que les CREPS, l’INSEP et les Ecoles nationales ou le Centre national des sports de la défense (CNSD) et nous nous attacherons à sécuriser le parcours des sportifs professionnels, de la formation à la retraite en passant par la reconversion professionnelle.
Nous partageons votre proposition d’imposer dans le cahier des charges de la télévision de service public l’obligation d’assurer le signal de retransmission d’un événement sportif de niveau mondial mais également de niveau national. La question des retransmissions publiques des compétitions sportives est une question essentielle pour la démocratisation de tous les sports, pour garantir l’équité entre les différentes disciplines et notamment dans la promotion des pratiques sportives des femmes. En dépit de leurs performances de premier rang mondial, les matchs des équipes de France de football ou de handball féminines ont été très insuffisamment retransmis. Nous proposerons notamment de modifier la loi sur la question des retransmissions télévisées afin que les manifestations sportives féminines soient traitées de la même manière que les manifestations sportives masculines.
Nous partageons votre souci de permettre à notre pays d’accueillir de grands évènements sportifs internationaux, c’est pourquoi nous sommes très attachés à permettre la réalisation d’un schéma cohérent d’équipements sportifs qui devra prendre en compte cette dimension essentielle au rayonnement de la France. Nous soutiendrons en particulier le mouvement sportif français de manière à ce qu’il puisse, dans les meilleures conditions, contribuer à représenter la France dans les institutions internationales, afin de promouvoir les candidatures françaises à l’organisation d’événements sportifs majeurs.
Nous partageons votre volonté de combattre les actes illicites dans le sport et nous les combattons également dans la société. Les actes illicites participent de la dégradation de la vision éducative du sport, du statut de son spectacle et mettent parfois en péril l’intégrité physique des athlètes. Nous estimons que ces délits sont passibles de sanction judiciaire car les lois de la République doivent être les mêmes pour tous et s’appliquer à tous. C’est la raison pour laquelle, en l’état de nos réflexions nous ferons en sorte que s’appliquent réellement les lois et règlements existants. Quant à instaurer un « délit d’atteinte à l’image ou à l’éthique » il y a là une question emportant des conséquences trop graves pour qu’il soit possible d’y souscrire avec sagesse.
La situation actuelle qui résulte de la concomitance d’un désengagement continu de l’Etat et de l’expression d’une tutelle pointilleuse n’est pas tolérable. Nous aurons à cœur de restaurer, approfondir et repenser le fonctionnement du partenariat institutionnel fondé dans la loi entre l’Etat et le mouvement sportif. Cette relation se conçoit bien évidemment sur une base contractuelle prenant en compte les responsabilités institutionnelles de chacun des partenaires et s’inscrivant dans une volonté commune de coopération. L’Etat mettra tout en œuvre pour faciliter l’exercice des missions conventionnées avec le mouvement sportif, en renforçant notamment les moyens budgétaires et humains.
Nous partageons au plus haut point votre souci de consolider le financement du service public du sport et d’assurer les moyens de son développement au service de tous nos concitoyens. Comme vous pouvez le constater à travers nos préoccupations évoquées ci-dessus, le Front de gauche porte une nouvelle ambition pour le sport français et entend engager l’Etat à assumer pleinement ses responsabilités en relation avec ses partenaires institutionnels, parties prenantes du service public du sport. C’est pourquoi nous romprons avec le désengagement de l’Etat dans le sport et donnerons au mouvement sportif les moyens de l’accomplissement de ses missions de service public. Nous doublerons immédiatement le budget consacré au sport pour évoluer vers 1% du budget de l’Etat en fin de mandature.