Pour le sport

Article de Nicolas Bonnet

publié dans l'Humanité le 4 juin 2012

Les 30es jeux Olympiques auront lieu du 27 juillet au 12 août 2012 à Londres. Le nouveau président de la République fera ses premiers pas sur le terrain du sport avec de grands rendez-vous : Euro 2012 de football, Tour de France cycliste, avant d’ouvrir le dossier de l’accueil de l’Euro 2016 de football et la construction des grands stades. Autant d’événements qui cristallisent les passions et posent question sur la réalité sportive et les valeurs qu’elle véhicule : salaires indécents, médiatisation, dopage, corruption, coût des installations et de leur gestion… L’avenir du sport est-il définitivement voué au business et à la marchandisation à tous les étages ? Le sport peut-il encore être porteur de progrès et d’émancipation pour l’être humain ? À quelles conditions ? (1)

Questions essentielles d’autant que les choix politiques des dernières années ont démantelé progressivement la colonne vertébrale du modèle sportif français : un ministère des Sports avec 15 % des effectifs en moins, la fin des directions départementales et régionales de la jeunesse et des sports, les fermetures de huit Creps mais aussi l’abandon pur et simple de métiers et de missions et un budget en stagnation qui n’a jamais dépassé 0,2 % du budget national.

Il va falloir reconstruire, répondre aux enjeux d’actualité, aux aspirations des populations. Et cette reconstruction ne peut se faire sans une rupture radicale avec l’idéologie dominante dans le sport. Il faut donc politiser la question du sport, vivifier les pouvoirs citoyens et notamment la démocratie dans le sport partout où c’est possible en impulsant un grand débat au sein du mouvement sportif. Le changement ne peut venir que de l’intérieur. C’est le sens de la campagne du Front de gauche avec les nombreuses réunions organisées dans toute la France.

Dans chacune de ces rencontres sont posées les questions de la place du sport à l’école, la situation de la vie associative, la conquête du temps libre et la place du corps dans notre société. Nous le savons, toutes les doctrines d’oppression commencent par la négation ou le contrôle du corps. Le corps a toujours été un enjeu de domination et donc de pouvoir. L’enjeu politique majeur est le droit à dominer son propre corps et à l’accomplir dans toutes les dimensions de son potentiel physique et intellectuel. Le sport ne peut pas être considéré comme un simple divertissement, ni comme un remède à tous les maux de la société, il doit être appréhendé comme un élément fondamental de l’émancipation humaine.

Enfin, il n’y aura pas de victoire complète à gauche sans de réels progrès dans la vie quotidienne des Français. Les familles doivent pouvoir mesurer concrètement le changement. Par exemple, sur le coût de la pratique, sur la valorisation de l’engagement des bénévoles en garantissant le temps, les moyens et la formation nécessaires pour se consacrer à la vie de leur association. Je pense à l’égalité de traitement médiatique des sports et notamment du sport féminin, tout comme la proportionnalité dans les instances nationales ou l’égalité de salaires entre sportifs et sportives. Toutes les collectivités territoriales attendent une aide concrète de l’État pour financer de nouveaux équipements sportifs et répondre aux besoins de tous les publics. Enfin, les parcours des sportifs professionnels doivent être sécurisés de la formation à la reconversion, tout en instaurant un salaire maximum et minimum. Ces propositions peuvent être réalisées par la ratification d’une grande loi-cadre sur le sport. Le point de départ est de considérer le sport comme un droit pour toutes et tous, comme le droit à la culture, à la santé, au travail, au logement. C’est en mettant le sport à ce niveau-là que nous pourrons conjuguer les mesures concrètes, les moyens humains et financiers nécessaires.

(1) Voir la Revue du projet, sports, l’humain d’abord, 
qui sera présentée le 6 juin à 18 heures au siège du PCF, place du Colonel-Fabien à Paris.

En finir avec le sport-business tous azimuts